Portfolio

À la fois carnet de notes et cahier de croquis, l’appareil photo accompagne le randonneur au fil des chemins. « S’il n’y a pas d’émotion, un choc, on ne doit pas prendre de photo, avertit Henri Cartier-Bresson. C’est la photo qui nous prend. Pour signifier le monde, il faut se sentir impliqué dans ce que l’on découpe à travers le viseur. » Photographier, c’est, selon lui, « mettre sur la même ligne de mire la tête, l’œil et le cœur. C’est une façon de vivre. » À l’instar de la randonnée, de la marche en raquette ou à ski de forêt, du voyage qui prend le chemin comme but.

Happé par les paysages qu’il traverse, chaque randonneur est un collectionneur d’horizons qui s’ignore, un orpailleur du moment présent qui, à travers ses photographies, cherche à transmettre – à tous ceux qui ne peuvent être là ici et maintenant – son éblouissement, comme devant la sérénité des dunes du désert de l’Adrar en Mauritanie, la beauté des calanques de Marseille ou la quiétude des lagunas dans les Andes, lagunes au pied d’un volcan créés par de violentes irruptions.

Instants fugaces immortalisés par l’objectif, les portraits d’enfants, d’habitants qui prennent la pause ou s’échinent au travail – comme ces femmes équatoriennes qui veillent toute leur vie sur leur troupeau éparpillé le long des pentes andines à plus de 3 000 mètres d’altitude – peuvent saisir une réalité fuyante : une joie de vivre que nous avons parfois perdue sous nos latitudes et une dure inégalité économique, qui assigne à certaines populations une vie de labeur écrasant. 

Photographier pour Cartier-Bressson, c’est « retenir son souffle quand toutes nos facultés convergent pour capter [cette] réalité : la saisie d’une image devient alors une grande joie physique et intellectuelle. »

« Si ton œil était plus aigu, tu verrais tout en mouvement. »