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Le Groenland fond et
le patrimoine de l’Unesco
fuit par la bonde

24/09/2022
Laurent Lefèvre

Constatée depuis vingt-cinq ans, la fonte de la calotte glaciaire du Groenland risque de s’accélérer. Des glaciers, comme celui du fjord d’Ilulissat classé au patrimoine mondial de l’humanité, sont menacés. Pour les habitants, notamment les populations inuites, les impacts du réchauffement climatique bouleversent déjà leur mode de subsistance.

En 2021, pour la 25e année consécutive, la calotte glaciaire du Groenland a perdu plus de masse pendant la saison de fonte qu’elle n’en a gagnée pendant l’hiver : 166 milliards de tonnes de glace se sont « évaporées » en 2021, selon un récent rapport de l’ONU. En vingt ans, elle a perdu 4,7 millions de milliards de litres d’eau et contribué à élever le niveau de la mer de 1,2 cm, selon les mesures effectuées par Polar Portal depuis 2002.

Avec la fonte de sa calotte glaciaire vieille de plus de 100 000 ans, le Groenland a perdu 166 milliards de tonnes de glace en 2021.
Avec la fonte de sa calotte glaciaire vieille de plus de 100 000 ans,
le Groenland a perdu 166 milliards de tonnes de glace en 2021.

« L’amplification arctique »

Cette destruction risque de s’aggraver car, depuis 1979, l’Arctique s’est réchauffé près de quatre fois plus vite que la planète, un phénomène connu sous le nom d’ « amplification arctique ».

Si la calotte glaciaire du Groenland devait fondre complètement et que toute l’eau se déversait dans l’océan, le niveau mondial des mers s’élèverait d’environ sept mètres, selon la Nasa : la Terre tournerait plus lentement, la durée du jour devenant plus longue qu’aujourd’hui, d’environ 2 millisecondes.

Le 10 juillet 2019, des icebergs géants se sont formés en se détachant brutalement
du glacier Sermeq Kujalleq 
engendrant de hautes vagues qui ont envahi le fjord glacé d’Ilulissat
(baie de Disko, côte ouest du Groenland).

Glaciers groenlandais : espèces vulnérables et menacées

Les jours du fjord glacé d’Ilulissat, classé au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, sont-ils comptés ? Situé sur la côte ouest du Groenland dans la baie de Disko, ce fjord de 70 km2 se trouve à l’embouchure maritime du glacier Sermeq Kujalleq (également appelé glacier d’Ilulissat). Avec ses parois qui peuvent atteindre 100 mètres de hauteur, c’est l’un des plus actifs au monde : il produit plus d’icebergs que tous les autres glaciers du Groenland.

Selon Polar Portal [en anglais], « 2021 a vu une accélération de sa perte de glace alors que ce taux avait stagné pendant plusieurs années. »


Comment sauver les glaciers ?
Écoutez Chaleur humaine, le podcast du Monde,
avec la glaciologue Heïdi Sevestre.
Un homme inuit âgé, habitant de Nuuk, la capitale du Groenland (côte ouest).
Un homme inuit, habitant de Nuuk, la capitale du Groenland (côte ouest).

Impacts du réchauffement climatique sur les habitants

Selon une enquête nationale menée en 2018-2019 [en anglais], la plupart des résidents du Groenland (55 %) estiment que le glacier le plus proche de leur ville ou de leur village a reculé au cours de ces dernières décennies et que cette évolution est périlleuse.

76 % disent avoir personnellement ressenti les effets du changement climatique, mais les sujets d’inquiétudes varient selon leur région : perte et amincissement de la glace de mer (principalement dans les régions situées au nord, nord-ouest et à l’est), fonte de la calotte glaciaire (surtout à l’ouest), imprévisibilité du temps (sud-ouest), tempêtes intenses et fonte des glaciers (sud). 

Cela s’explique par le fait qu’en fonction de leur lieu de résidence, les 56 661 habitants de cet immense territoire (2,17 millions de km2, près de quatre fois la France) sont soumis à différentes conditions météorologiques (plus intenses dans les régions du Nord) et confrontés à des phénomènes naturels et climatiques extrêmes, comme la nuit polaire et des records de froid – le Groenland a enregistré le 22 décembre 1991 la température la plus basse (-69,6 °C) de l’hémisphère Nord.

79 % des habitants de l’île pensent que la glace de mer locale est devenue plus dangereuse pour se déplacer – le bateau constitue le principal moyen de transport au Groenland, qui ne possède pas de réseau routier. C’est particulièrement problématique pour les familles (trois sur quatre) qui dépendent pour leur alimentation de denrées qu’elles chassent, pêchent ou cueillent. « La chasse et la pêche de subsistance font toujours partie du mode de vie groenlandais. Et les Inuits sont personnellement exposés aux dangers et aux difficultés d’un environnement qui change rapidement », souligne la géologue Karin Kirk, qui a étudié l’évolution du climat sur place. 

Une majorité des habitants du Groenland estiment d’ailleurs que le changement climatique nuira à la chasse, à la pêche et aux chiens de traîneau. Pour Paulus Larsen, un Inuit de l’Est du Groenland, ces difficultés sont déjà présentes :

« Il y a aujourd’hui plus de neige que par le passé – parfois deux mètres ou plus. La glace fine recouverte d'une épaisse couche de neige est très peu fiable. Sortir simplement sur la glace pour aller pêcher le suluppaavaq (perche d’océan) n’est plus possible. »

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